La ruelle, dans la pénombre, offrait une tranquillité propice à la réflexion.
Assis en tailleur sur un baril vide, Adaouï faisait tournoyer sa pokeball sur le bout de son index avec agilité, en la fixant. Toutes ses pensées étaient tournées vers ce petit objet rond, rouge comme le sang, blanc comme la mort.
Une ombre encapuchonnée se faufila maladroitement. C'était Kafko, un de ses anciens clients. D'un geste furtif, Ada dissimula sa pokeball dans sa poche.
- Wo Sissoko.
- J'ai rien pour toi, Kafkouille, rent' chez ta mère.
- Vas-y, t'as pas un p'tit fond de carbone ? J'ai pécho un Nidoran mais il est trop gros, faut qj'le dope là sinon y va s'faire bouffer par tout c'qui traîne.
- S'tu l'dis. Moi j'ai plus rien, j'ai arrêté ces conneries.
- Tu dis ça tous les deux mois, toccard !
Ignorant cet affront, Adaouï tâta l'intérieur de sa poche, inconsciemment, comme pour s'assurer que sa pokeball y était encore. Son geste n'échappa pas à Kafko.
- T'as quoi ?
- T'occupe.
- T'as du carb ? Vas-y t'as du carb et tu veux pas m'le dire ?
- T'occupe j'te dis !
Kafko fourra de force la main dans la poche d'Adaouï lui arracha sa pokeball, sans comprendre tout de suite de quoi il s'agissait.
Puis il se prit le poing d'Adaouï dans la figure ; la sphère lui échappa des mains et voltigea à l'autre bout de la ruelle.
Après quoi il s'enfuit de l'autre côté, hurlant et pestant contre son agresseur de la plus grossière des façons. Ses jurons se firent distants.
Debout au centre de cette allée sombre et étroite au cœur de Bourg-Baston, Sissoko hésita, resta immobile pendant de longues secondes. Deux chemins l'appelaient. L'effort qui l'avait poussé à aller choisir un starter le matin même lui apparaissait désormais comme une méprise, une erreur.
Une erreur qu'il pouvait corriger dés maintenant, en n'allant pas ramasser cette pokeball.